Le cocktail de mesures adoptées ces trois dernières années pour contrer l’envolée du budget de la Caisse des dépôts dédié au compte personnel de formation (CPF) a-t-il porté ses fruits ? Oui, affirme France compétences dans son rapport annuel 2023 sur la gestion administrative, comptable et financière, publié hier. “Le dispositif semble avoir trouvé un certain équilibre”, résume l’instance quadripartite. “L’année 2023 pourrait ainsi être considérée comme une année de référence en matière de consommation pour le CPF. Le nombre de dossiers validés sur une année a baissé à 1,8 million en 2022 puis à 1,3 million en 2023”.
La tendance devrait se confirmer en 2024 : “le nombre de bénéficiaires du dispositif (…) serait stable”. “Les dépenses devraient, elles, osciller “entre de 2 milliards d’euros à 2,3 milliards d’euros, contre 2,02 milliards en 2023”. En octobre 2023, France compétences tablait sur une enveloppe de trois milliards d’euros.
Le dérapage budgétaire tant redouté n’a pas eu lieu. Il faut dire que France compétences n’a pas lésiné sur les moyens. Pressée de réagir face aux difficultés financières, l’institution a décidé de mettre plusieurs mesures de régulation sur la table.
Le déférencement massif de formations à la création ou à la reprise d’entreprise non conformes à la réglementation, la mise en œuvre début octobre 2021 d’une nouvelle procédure d’enregistrement des organismes de formation (OF) sur Mon compte formation, la lutte contre le démarchage abusif , en 2022 et surtout l’entrée en vigueur d’une authentification renforcée via FranceConnect+ préalablement à tout achat de formation, ont fait reculer les achats de formation. L’instauration d’un reste à charge, fixé à 100 euros et l’encadrement plus strict du financement du permis de conduire, lancés depuis mai dernier, devraient également contribuer à réduire la voilure.
Toutefois, ces mesures n’ont pas détourné les actifs du CPF. “Le dispositif est pleinement inscrit dans la politique publique de la formation professionnelle”, insiste France compétences. Depuis son lancement, en 2019, 4,7 millions de personnes ont ainsi bénéficié d’une des 192 000 formations proposées par 15 000 organismes.
A noter : quelle que soit le profil des bénéficiaires, les formations diplômantes sont les plus plébiscitées. Parmi elles, 42 % sont liées à une certification enregistrée au Répertoire spécifique (RS) et 20 % préparent à un titre ou à un diplôme attestant d’une qualification enregistrée au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Le poids des formations portant sur la création et la reprise d’entreprise (Acre) est, lui, trois fois moins important en 2023 qu’en 2022.
Le coût moyen s’établit à 2 260 euros (pour une durée moyenne de 113 heures). Mais des disparités existent : si ces formations s’élèvent à 480 euros (sept heures) pour le développement des capacités comportementales et relationnelles, elles s’envolent à plus de 10 950 euros (977 heures) pour des spécialités technologiques diplômantes (BTS, ingénieur, licence professionnelle).
Sans surprise, les formations diplômantes restent parmi les plus chères du marché.
Les niveaux de formation des bénéficiaires en 2023
Niveaux de formation | Nombre de bénéficiaires (en %) |
Préqualification/BEPC/sans diplôme | 16,6% |
CAP, BEP | 21,3% |
Bac ou brevet professionnel | 22,4% |
Bac +2 ou supérieur | 38,1% |
Non renseigné | 1,6% |
Le top des certifications obtenues en 2023
Classement | Certification | Coût moyen de la formation |
1. | Permis de conduire catégorie B | 910 € |
2. | Bilan de compétences | 1 900 € |
3. | Création et reprise d’entreprise | 1 645 € |
4. | Test Toiec (Test of English for International Communication) | 1 850 € |
5. | Accompagnement VAE | 1 140 € |
Reste toutefois de nouveaux défis pour France compétences, notamment la recherche de partenaires financiers. Selon le bilan 2023, l’institution supporte 93 % des coûts de formation. La part financée par l’ensemble des autres financeurs, France Travail, les entreprises, les régions, les opérateurs de compétences, l’Etat, ou encore la Cnam (au titre du compte professionnel de prévention) s’élève, elle, à 4 %.
Ainsi, en 2023, France compétences a déboursé 1, 77 milliards d’euros sur un budget global de 1,90 milliards d’euros.
Dans le viseur, les entreprises. Elles ne sont guère mobilisées. Certes, entre 2020 et 2023, elles ont bien versé 250 millions d’euros de dotations au profit de 91 145 bénéficiaires. Mais seuls 50 millions ont été fléchés, au titre des dotations volontaires, pour financer les formations des salariés en complément de leurs droits (20 %).
La principale source de dépense concerne les abondements correctifs. Une sanction prévue par le décret du 30 décembre 2021, en cas de non-réalisation des entretiens professionnels récapitulatifs ou pour absence de proposition de formation au cours des six dernières années. Entre 2020 et 2023, ce sont ainsi 175 millions d’euros qui ont été versés à la Caisse des dépôts, qui gère le CPF, pour combler ces manques.
Les branches professionnelles font-elles mieux ? La Caisse des dépôts note que “leur politique d’abondement s’est fortement développée entre 2022 et 2023”. Sept d’entre elles, l’enseignement privé (privé non lucratif, et privé agricole), la santé, l’agro-alimentaire, les bureaux d’études et de conseil, la culture, et la branche du sport ont participé au co-financement du CPF pour un total de de 2, 73 millions en faveur de 2 532 bénéficiaires.
Dotation des entreprises en 2023
Type de dotation | Montant versé en euros |
En % |
Montant moyen en euros | Nombre de bénéficiaires |
Dotation salarié licencié | 12,86 millions | 5,1% | 3 311 | 3 880 |
Dotation volontaire | 59,87 millions | 23,9 % | 2 120 | 26 498 |
Droit correctif | 174,99 millions | 70,0 % | 3 000 | 58 183 |
Droit supplémentaire | 2,25 millions | 0,9 % | 511 | 2 768 |
Total général | 249,98 millions | 100 % | 2 635 € | 91 145 |
Cet article provient du site Editions Législatives - ActuEL RH