Le candidat ou l’élu sur la liste d’un syndicat adhérant au protocole d’accord préélectoral ne peut pas le contester après les élections


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Le syndicat adhérant à un PAP contraire à l’ordre public ne peut pas le contester après les élections

En principe, un protocole d’accord préélectoral (PAP) conclu aux conditions de double majorité peut être contesté en justice s’il contient des stipulations contraires à l’ordre public, notamment aux principes généraux de droit électoral (arrêt du 6 octobre 2011 ; arrêt du 22 octobre 2014 ; arrêt du 4 mai 2017).

La chambre sociale de la Cour de cassation a toutefois apporté un tempérament à ce principe dans un arrêt du 24 novembre 2021 en décidant qu’un syndicat, qui, soit a signé un tel protocole, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du PAP et demander l’annulation des élections, quand bien même il invoquerait une méconnaissance par ledit protocole de règles d’ordre public.

L’arrêt rendu le 11 septembre 2024 confirme ce principe tout en le précisant. En effet, s’il résultait de la formulation retenue dans l’arrêt du 24 novembre 2021 précité que l’action en nullité du protocole préélectoral fondée sur une méconnaissance des règles d’ordre public, notamment des principes généraux du droit électoral, pouvait être introduite judiciairement après la proclamation des résultats par un syndicat non-signataire du protocole qui n’avait pas présenté de candidats ou qui l’avait fait en émettant des réserves, un doute demeurait sur le droit d’action du syndicat signataire ayant émis des réserves. La formulation retenue dans l’arrêt du 11 septembre 2024 lève tout doute à ce sujet. La Haute juridiction indique ainsi clairement que ne peut pas contester la validité du protocole d’accord préélectoral et demander l’annulation des élections après la proclamation des résultats de celles-ci le syndicat qui, soit a signé le protocole sans réserves, soit a présenté des candidats sans émettre de réserves.

Dans l’arrêt du 24 novembre 2021, le syndicat demandeur avait fait valoir que le PAP dérogeait à un principe général du droit électoral en prévoyant une période d’appréciation de l’acquisition de l’ancienneté plus large que celle prévue par le cadre légal. Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 11 septembre 2024, où les élections s’étaient déroulées par vote électronique, les syndicats demandeurs invoquaient le non-respect du principe général du droit électoral de l’exercice personnel du droit de vote.

L’impossibilité de contestation s’étend aux candidats et élus sur la liste de ces syndicats

L’arrêt du 11 septembre 2024 est aussi l’occasion pour la Cour de cassation de poursuivre sa construction jurisprudentielle. Elle décide ainsi qu’il résulte du principe ci-dessus qu’un salarié candidat ou élu sur la liste présentée par un syndicat ayant, soit signé sans réserves le PAP, soit présenté des candidats sans avoir émis de réserves, ne saurait, après proclamation des résultats des élections professionnelles, contester la validité du PAP et demander l’annulation des élections, quand bien même invoquerait-il une méconnaissance par le PAP de règles d’ordre public.

Il y a assez peu de décisions relatives à la capacité pour un électeur ou un candidat de contester le protocole et les élections sur la base duquel elles ont été organisées. La Cour de cassation avait décidé, dans un arrêt non publié, qu’un électeur pouvait, après les élections, former une contestation relative au PAP et aux élections dans le collège auquel il appartenait, même si sa candidature avait été présentée par un syndicat ayant signé ce protocole (arrêt du 10 mai 2012). Cette décision est donc remise en cause.

Mais rien n’empêche de contester le protocole préélectoral avant les élections

La Cour de cassation s’attache ainsi à éviter la contestation des élections par des syndicats et des candidats et/ou élus à la suite de résultats décevants, en arguant d’une irrégularité du protocole préélectoral sur lequel les syndicats n’avaient émis aucune réserve, ni à la signature, ni lors de la présentation de leurs listes de candidats.

Cette jurisprudence ne s’oppose pas, selon nous, à ce que ces syndicats et candidats et/ou élus puissent agir en nullité du protocole préélectoral sur le fondement d’une atteinte à l’ordre public avant la tenue des élections.  D’une part, l’annulation d’un protocole préélectoral peut être demandée en justice dès sa signature, ainsi d’ailleurs que, par voie de conséquence, l’annulation des élections à intervenir (arrêt du 12 mai 2021). D’autre part, dans le cas où un syndicat conteste le protocole avant les élections, son action semble nécessairement guidée par la défense de l’ordre public électoral.

Il pourrait toutefois ne pas en être de même lorsque la contestation est formée après que les élections se sont déroulées mais avant la proclamation des résultats. Le syndicat demandeur, signataire sans réserves du protocole ou y ayant adhéré en présentant des candidats sans émettre de réserves, pourrait être suspecté d’avoir “gardé sous le coude” l’éventualité d’une action au cas où les résultats électoraux ne seraient pas à la hauteur de ses espérances. Son action ne serait plus alors guidée par la défense de l’ordre public et l’intérêt général, mais par la satisfaction d’un intérêt propre. Une telle suspicion supposant des investigations aux résultats bien aléatoires et hors de propos devant le tribunal judiciaire chargé du contentieux électoral, il ne serait pas surprenant que la Cour de cassation ait voulu éviter cette situation. Mais cela reste à confirmer, car la Haute juridiction s’est abstenue de se prononcer explicitement sur la recevabilité ou non d’une action introduite avant la proclamation de ces résultats.

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Muriel Gien
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La Cour de cassation considère que, lorsqu’un protocole préélectoral répond aux conditions de double majorité, le syndicat qui l’a signé ou qui a présenté des candidats sans émettre de réserves ne peut pas en contester la validité après la proclamation des résultats, même en cas de méconnaissance de règles d’ordre public. Elle poursuit aujourd’hui sa construction jurisprudentielle en décidant qu’il en va de même pour les salariés candidats ou élus sur la liste de ces syndicats.
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Cet article provient du site Editions Législatives - ActuEL RH