Ces inconnues qui gâchent la rentrée des DRH


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Alors que le gouvernement Barnier se met en place, les DRH doivent composer avec de nombreuses inconnues. Quelles seront les priorités du nouvel exécutif ? Et surtout ses arbitrages en matière économique et social ? Les nombreux dossiers législatifs en suspens sur la réforme des retraites, le PLF, l’aide à l’apprentissage pourraient avoir des répercussions sur les chantiers de la rentrée. À commencer sur la préparation des négociations annuelles obligatoires. “Si la fiscalité des entreprises augmente, les DRH pourraient décider de réviser leurs budgets”, insiste Didier Cauchois, consultant au sein de LHH. Déjà, elles se montrent prudentes, avec des prévisions de l’ordre de 1,5 % à 3 %, contre 3,5 % cette année.

“Les DRH devront faire preuve de pédagogie pour faire comprendre aux organisations syndicales les enjeux économiques et éviter des revendications en décalage. Le manque de concertation peut conduire à des décisions unilatérales, en deçà des accords d’entreprise”.

Les 50-54 ans, une population à choyer

L’emploi des seniors est aussi dans le flou. Si Michel Barnier ne compte pas revenir sur le départ de l’âge légal, à 64 ans, il s’est dit ouvert à une négociation avec les partenaires sociaux, notamment sur des mesures spécifiques en faveur de certains publics, telles que les personnes aux carrières longues. Reste à savoir quelle pourrait être l’issue d’une telle négociation.

“Elle est pourtant primordiale, insiste Didier Cauchois. Les organisations patronales et syndicales peuvent parvenir à un compromis. Il y a urgence. Pour moi, c’est l’enjeu de demain”. “Dans certains cas de restructurations, les seniors apparaissent malheureusement comme une variable d’ajustement. Ils quittent l’entreprise pour invalidité ou d’inaptitude bien avant de pouvoir partir à la retraite à taux plein à 62 ans. De départs souvent préjudiciables pour l’entreprise. Or, des dispositifs existent. Dans la boîte à outils des DRH figurent, par exemple, la retraite progressive, le temps partiel allégé pour préparer les transitions”.

Mais au-delà de la carrière des seniors, “une autre génération mérite toutes les attentions des DRH. Celle des salariés de 50-54 ans pour qui ils restent 10 ans à travailler, assure Olivier Brevet, directeur associé du cabinet Oasys. Car avec l’allongement de la vie active, leur carrière risque de piétiner ” A charge pour les DRH “de trouver de nouveaux leviers de motivation propres à ces derniers”.

Le retour des PSE

L’agenda des DRH ne sera pas dicté uniquement par le nouvel exécutif. Déjà ils ont fort à faire. Car cette rentrée a quelque chose d’inédit. “Après le rebond post-Covid, le marché du travail se grippe”, constate Olivier Brevet qui observe une recrudescence des dossiers de restructurations depuis fin 2023. L’heure n’est plus à l’optimisme. Avec une conjoncture maussade, “les préoccupations des DRH visent moins la rétention et la fidélisation mais à nouveau les réorganisations”. Les causes sont conjoncturelles mais aussi structurelles ; “plusieurs secteurs connaissent des revirements technologiques ou des changements de paradigmes, à l’instar du retail, de l’immobilier mais aussi de l’automobile qui affrontent plusieurs vents contraires”.

Certes, les entreprises n’avaient pas délaissé les ruptures conventionnelles collectives, ni les plans de départs volontaires pendant la parenthèse enchantée de l’après-crise sanitaire. Mais cette fois, elles devraient aller un cran plus loin, en préparant des plans de sauvegarde pour l’emploi. Un sujet sensible. “Car l’objectif du PSE est de permettre un ajustement à chaud là où le plan la RCC ou le PDV sont une déclinaison plus « soft », socialement plus acceptables”. Mais pour le consultant, ce changement de braquet est incontournable car un PSE permet de cibler précisément les emplois et les métiers concernés, sans crainte de ne pas atteindre son objectif.

L’enjeu de la GEPP

Entre ces deux options toutefois, une alternative existe, selon Olivier Brevet : celle de la gestion des emplois et des parcours professionnels.

“On observe un regain de cette thématique, dans un contexte de transformation des métiers”, confirme Didier Cauchois. “L’idée est de mettre en place des organisations agiles et apprenantes pour que les entreprises puissent renforcer leur réactivité collective tout en permettant à chacun (dirigeants, managers, collaborateurs…) de se mobiliser en fonction de ses propres objectifs”, renchérit Olivier Lagrée, conseiller en stratégie de gestion des talents chez Cornestone. Selon PwC, plusieurs entreprises ont d’ores et déjà mis en place des centres d’excellence sur la conduite du changement, adossés à la DRH et composés d’équipes pluridisciplinaires pour anticiper les changements.

L’irruption de l’intelligence artificielle générative n’est pas étrangère à ces initiatives. Les entreprises doivent jouer la carte de la mobilité interne pour éviter l’obsolescence “de plus en plus accélérée” des compétences et dessiner les savoir-faire de demain.

D’ores et déjà, plusieurs entreprises ont lancé des programmes de formation, à la fois de “up-skilling” pour apporter une brique supplémentaire de compétences mais aussi de “re-skilling” (ou requalification) pour préparer une reconversion professionnelle.

“La mère des batailles est aujourd’hui pour les DRH celle des compétences”, se félicite Olivier Lagrée.

Heureusement les DRH sont mieux armés pour naviguer par gros temps. “Depuis la crise sanitaire, ils ont considérablement accru leur capacité à composer avec l’incertitude en priorisant plus efficacement leurs chantiers par comparaison à l’époque pré-Covid”, assure Olivier Lagrée. 

Pas de remise en cause du télétravail

Et si le télétravail reste un point de vigilance pour les DRH, il ne “devrait pas être remis en question”, assure Didier Cauchois. “Ce sujet, négocié avec les partenaires sociaux, n’est nullement conflictuel. Supprimer ce mode de travail entraînerait une crise sociale qui n’a pas lieu d’être. Les entreprises comme les salariés semblent y trouver leurs comptes ; les premières, en réduisant leur coût de structures, avec la mise en place du flex-office ; les seconds, en conciliant leur vie professionnelle et personnelle”.

Une tendance confirmée par l’Apec, dans une étude du 18 septembre : pour la majorité des cols blancs, le télétravail n’est plus une “option” mais un “acquis” : le retour en arrière n’est pas envisageable.

Des ajustements peuvent néanmoins être trouvés, notamment “sur la manière d’optimiser la cohésion d’équipe, à travers la capacité à mener des projets communs et éviter la perte du lien social”, précise Didier Cauchois.

Des SIRH enrichis

Autre sujet d’importance : la transformation de la fonction RH, avec des SIRH rénovés. Deux tiers des DRH ont déjà engagé ou prévoient de réaliser des investissements technologiques significatifs afin de se doter d’outils plus performants pour la gestion administrative, le recrutement, la gestion de la performance et des carrières, selon Bouchra Roby, associée Workforce et Transformation RH de PwC France et Maghreb. De plus, ils peaufinent leurs offres de service, en déclinant, par exemple leur SIRH sur mobile. L’idée étant d’améliorer le quotidien des salariés.

Car plus que jamais, l’engagement des salariés sera prioritaire. D’autant qu’avec les turbulences de la rentrée, le “rapport de force entre salariés et employeur devient plus équilibré, contraignant candidats et collaborateurs à réviser leurs exigences individuelles”, remarque Olivier Brevet.

D’où la nécessité de “capitaliser sur l’esprit des Jeux olympiques et paralympiques, en mettant en avant l’esprit d’équipe, l’équité, la bonne ambiance et la performance, avance Olivier Lagrée. Et surtout de le faire perdurer dans la durée”.

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Anne Bariet
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Négociations annuelles obligatoires, gestion des seniors, emploi et GEPP devraient figurer parmi les dossiers phares de la rentrée des DRH. Reste que les professionnels RH sont dans le flou. Heureusement, ils sont habitués à gérer l’incertitude. Le point de vue de quatre consultants.
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Cet article provient du site Editions Législatives - ActuEL RH