L’avant-projet d’accord national interprofessionnel sur l’emploi des seniors est sur les rails. Le patronat a transmis hier aux organisations syndicales une troisième version du texte. Il sera discuté demain, date de l’ultime séance de négociation consacrée à ce sujet. Est-ce la fin des longs pourparlers qui ont commencé en janvier 2024 avec les discussions sur le Pacte de la vie au travail ? Rien n’est encore joué. Il faudra attendre jeudi pour savoir si le texte est à la hauteur des enjeux. Car le Medef, la CPME et l’U2P n’ont fait que peu d’avancées par rapport au texte précédent.
Dans le détail, le camp patronal persiste et signe sur le contrat dit “de valorisation de l’expérience”, accessible aux demandeurs d’emploi d’au moins 60 ans.
Les trois mouvements patronaux maintiennent la possibilité pour le nouvel embauché de cumuler salaire et allocation de retour à l’emploi, si sa rémunération est inférieure à plus 30 % à celle obtenue dans son emploi précédent. L’employeur bénéficie, lui, d’une exonération progressive de cotisations d’assurance chômage pour les employeurs recourant à ce nouveau dispositif. Deux points de crispation importants pour les organisations syndicales lors de la dernière séance, du 4 novembre.
Toutefois, ils font un pas en leur direction. Contrairement à la version précédente, le projet d’accord ne stipule plus que le candidat doit transmettre un document de l’assurance retraite à l’employeur pour attester de sa date prévisionnelle de départ à la retraite. L’objectif était ici de donner une visibilité à l’employeur sur la date de départ du salarié : la mise à la retraite étant possible dès l’obtention des conditions de retraite à taux plein, et non à 70 ans comme c’est le cas légalement aujourd’hui.
Dans cette nouvelle mouture, c’est le salarié qui a la main. Il peut, s’il le souhaite, indiquer cette information, lors de l’entretien professionnel se tenant après son soixantième anniversaire, mais sans obligation. Le texte précise qu’il serait “utile” et non plus “nécessaire” de donner ce renseignement, en appelant à “mettre en place les conditions d’un dialogue entre l’employeur et le salarié”.
A noter, la création de ce contrat d’un nouveau type supprimerait de facto le CDD senior.
Côté dialogue social, le camp patronal a fait quelques de concessions sur la négociation portant sur l’emploi et le travail des seniors. Le texte ramène de quatre à trois ans la périodicité de la négociation de branche, sauf accord de méthode “fixant une périodicité différente”. Dans les entreprises, le timing reste le même, à savoir trois ans également. Mais l’avant-projet d’accord indique qu’en l’absence d’accord, l’employeur peut adopter un plan d’action unilatéral ad hoc, après “consultation des instances représentatives élues du personnel lorsqu’elles existent”. Sans toutefois créer une obligation pour exhorter l’employeur à franchir le pas.
Qui plus est, le camp patronal a repris à son compte la demande de la CFDT, en ajoutant deux nouveaux thèmes de négociation, à savoir les politiques en matière de santé et de prévention des risques professionnels et l’organisation du travail, les conditions de travail et les relations sociales.
Enfin, le texte rappelle que l’entretien professionnel, effectué à partir de 58 ans, est l’occasion d’aborder les éventuelles possibilités d’aménagements de fin de carrière, par exemple la mise en place d’un temps partiel de fin de carrière et le recours à la retraite progressive, accessible dès 60 ans.
Le texte ne crée pas de droit opposable à ce dispositif, comme l’avaient demandé initialement de nombreuses organisations syndicales. Mais le patronat a repris à son compte l’une des revendications de la CFTC qui demandait que le refus de l’employeur soit motivé par une justification sérieuse. L’avant-projet de texte prévoit ainsi que cette fin de non-recevoir soit dûe à “l’incompatibilité de la durée du travail demandée par le salarié avec l’activité économique de l’entreprise”, en raison, par exemple, des “tensions de recrutement potentiels sur le poste concerné” ou “de la continuité d’activité de l’entreprise”.
Quel sera l’accueil réservé à ce texte ? Si le projet d’accord ne devrait pas fédérer l’ensemble des organisations syndicales, il est d’usage que la négociation paritaire ne se débloque que dans la dernière ligne droite. La séance du 14 novembre, qui pourrait jouer les prolongations jusqu’au lendemain, sera bel et bien “décisive”, comme l’indiquait, le 4 novembre, Olivier Guivarch, chef de file des pourparlers pour la CFDT.
L’avenant sur l’assurance chômage intègre des modifications |
Le projet d’avenant sur l’assurance chômage intègre désormais une partie du fruit des négociations de la semaine dernière. Sur les bornes d’âge des filières seniors, le texte précise que “les demandeurs d’emploi âgés de 55 ans [au lieu de 53 ans aujourd’hui] et plus à la date de fin du contrat de travail bénéficient d’une période de recherche de l’affiliation de 36 mois”. Au sujet des frontaliers, la nouvelle version de l’avenant mentionne que “les organisations syndicales appellent formellement les pouvoirs publics à entreprendre toutes les actions nécessaires pour qu’une révision des dispositions du règlement CE n°883/2004 et des accords bilatéraux existants intervienne le plus rapidement possible”. Le coefficient ne dépend plus du salaire journalier de référence mais “des salaires perçus à l’étranger”. La proposition de la CFDT de retenir les salaires médians n’est pour l’instant pas retenue puisque le texte en est resté aux salaires moyens. En revanche, la proposition de FO d’instaurer un plancher d’indemnisation se trouve traduite sous cette forme : “En tout état de cause, l’application de ce coefficient ne peut conduire au versement d’une allocation inférieure à l’allocation minimale, selon les modalités de calcul en vigueur à la date de signature du présent protocole d’accord”. |
Cet article provient du site Editions Législatives - ActuEL RH