Le 5 octobre, la chambre disciplinaire de première instance de Nouvelle-Aquitaine s’est prononcée pour une sanction à l’encontre de Thierry Amouroux pour incompatibilité entre deux fonctions qu’il exerce parallèlement. Ce dernier a écopé d’un avertissement.
Tout est parti de deux plaintes distinctes, l’une déposée par un infirmier et la seconde par le Conseil national de l’Ordre des infirmiers. En cause : le cumul de deux fonctions, celle de président du Conseil départemental de Paris et celle de président de la section syndicale de la CFE-CGC de l’AP-HP, exercées par Thierry Amouroux.
Un cumul générateur de risques
En effet, ce dernier occupe la première depuis 2008 et a occupé, en parallèle, celle de secrétaire général du SNPI CFE-CGC jusqu’en 2017 avant d’en devenir le porte-parole, et celle la section syndicale jusqu’en février 2021. Or, le Code de santé publique juge incompatibles mandat syndical et mandat ordinal. Si aucun fait tangible n’a été reproché à M. Amouroux, dont l’intégrité n’a pas été questionnée, cette situation comporte un risque : celui du conflit d’intérêt, entre défense d’intérêts catégoriels (mandat syndical) et celle de l’intérêt général (mandat ordinal). Alerté par le Conseil national de l’Ordre en 2019 et informé de l’incompatibilité de ses fonctions, Thierry Amouroux a toutefois tardé à démissionner ; ce n’est ainsi qu’en février 2021, mis en demeure par le Conseil, qu’il a accepté de mettre fin à ce cumul. C’est justement ce que lui a reproché la chambre disciplinaire de première instance de Nouvelle-Aquitaine.
Pour rendre sa décision, elle s’est appuyée sur le Code de la santé publique, notant que ses fonctions du président du Conseil de l’Ordre de Paris en 2008 faisaient déjà obstacle au cumul de leur exercice avec celui d’une quelconque fonction correspondante d’un syndicat professionnel
. Seules les fonctions de président et de trésorier étaient alors néanmoins mentionnées dans les textes ; Thierry Amouroux étant alors secrétaire général du SNPI, il a été reconnu qu’il n’a pas contrevenu aux dispositions en vigueur à l’époque (la règle s’est depuis étendue aux fonctions de vice-président et de secrétaire général).
En revanche, c’est la question de la possible incompatibilité entre ses fonctions au sein de la section syndicale de l’AP-HP et son mandat ordinal, et son refus de démissionner de ce dernier, qui a poussé la chambre à le sanctionner. Dans sa défense, Thierry Amouroux a fait valoir que la CFE-CGC, étant un syndicat interprofessionnel, ne constituait pas un syndicat professionnel au sens où l’entend le législateur dans les textes et qu’il ne pouvait donc pas y avoir incompatibilité entre ses deux fonctions. La chambre, en réponse, a toutefois jugé que en ne se préoccupant pas de s’assurer de la compatibilité de ses fonctions ordinales et syndicales et en persistant à les cumuler, même après avoir été averti de leur incompatibilité
, il a manqué à ses obligations déontologiques telles qu’elles sont définies dans le code des infirmiers, et notamment à celle de respecter en toutes circonstances les principes de moralité et de loyauté
. Compte tenu de l’engagement de M. Amouroux dans la défense de la profession infirmière, la chambre disciplinaire s’est prononcée pour un simple avertissement, soit la première sanction dans l’échelle de celles qui existent (avertissement, blâme, interdiction temporaire d’activité avec ou sans sursis, interdiction définitive d’exercer). Il sera également privé du droit de faire partie du Conseil de l’Ordre pour une durée de 3 ans dès que la décision sera définitive.
Une décision à vertus “pédagogiques”
La décision de la chambre disciplinaire est amenée à faire date, commente l’avocat, Maître Renan Budet, proche du dossier. Si elle ne donnera pas lieu à une création de droit dans les textes, et si elle énonce l’application d’une règle déjà existante, elle a toutefois des vertus pédagogiques, c’est indéniable
et ce d’autant plus dans une profession où l’appartenance syndicale demeure très forte. Contacté, M. Thierry Amouroux a indiqué qu’il ferait appel de cette décision, entraînant ainsi la suspension de son exécution.
La Rédaction d’Infirmiers.com
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