BIC – Base d’imposition – Régime optionnel applicable aux opérations portant sur les brevets et actifs incorporels assimilés – Champ d’application


1

Les dispositions de l’article 238 du code général des impôts (CGI) sont susceptibles de s’appliquer aux entreprises industrielles, commerciales, agricoles ou libérales relevant de l’impôt sur le revenu et soumises de plein droit ou, sur option, à un régime réel d’imposition, ainsi qu’aux entreprises passibles de l’impôt sur les sociétés.

Les sociétés de personnes et assimilées relevant de l’article 8 du CGI sont également susceptibles de bénéficier des dispositions de l’article 238 du CGI.

En revanche, ce régime ne s’applique pas aux inventeurs personnes physiques mentionnés à l’article 93 quater du CGI. Le régime applicable à ces derniers est exposé au BOI-BNC-SECT-30.

A. Brevets au sens large

10

Le régime prévu à l’article 238 du CGI s’applique aux brevets au sens strict tels que définis au II-A-1 § 50, ainsi qu’aux autres titres de propriété industrielle tels que les certificats d’utilité et les certificats complémentaires de protection rattachés à un brevet.

20

Il s’applique également aux titres étrangers équivalents à l’un des titres mentionnés au II-A § 10 délivrés par un office étranger de propriété industrielle.

Il en est ainsi par exemple d’un brevet d’invention délivré par l’organisme américain United States patent and trademark office (USPTO) ou d’un modèle d’utilité délivré par l’Office d’État de la propriété intellectuelle de la République populaire de Chine (CNIPA).

30

Seuls les titres mentionnés au II-A § 10 en cours de validité sont susceptibles d’entrer dans le champ d’application de l’article 238 du CGI.

Toutefois, y sont également admis, à titre provisoire, les brevets et certificats d’utilité en cours de délivrance. Dans ce cas, lorsque la délivrance du titre n’est pas intervenue à la clôture du troisième exercice suivant la date d’option pour le régime au titre de cet actif, l’entreprise est tenue de souscrire des déclarations de résultats rectificatives pour les exercices au titre desquels elle a appliqué les dispositions de l’article 238 du CGI à des revenus afférents à un brevet ou un certificat d’utilité alors en cours de délivrance. Cette régularisation n’emporte pas les effets de la déchéance de l’option exposés au I-B-4 § 120 du BOI-BIC-BASE-110-20.

Pour être considérés comme valides les brevets et les certificats d’utilité doivent :

  • ne pas avoir été déclarés nuls en application de l’article L. 613-25 du code de la propriété intellectuelle (CPI). Dans le cas contraire, l’application du régime prévu à l’article 238 du CGI aux cessions, aux concessions et aux sous-concessions en cours serait remise en cause, sous réserve des règles de prescription ;
  • ne pas être atteints de déchéance pour cause de non-paiement de la redevance prévue à l’article L. 612-19 du CPI ;

Remarque : Toutefois, la déchéance du brevet ou du certificat d’utilité ne serait pas opposable à l’entreprise si ses droits étaient restaurés conformément à l’article L. 612-16 du CPI.

  • ne pas être tombés dans le domaine public.

Le régime cesse ainsi de s’appliquer à compter de la date à laquelle l’un de ces événements est intervenu, pour le ou les actifs concernés.

40

Par ailleurs, le régime est susceptible de ne s’appliquer pour le titulaire d’un brevet ou d’un certificat d’utilité, en cas de copropriété au sens de l’article L. 613-29 du CPI, qu’à hauteur de ses droits sur celui-ci.

1. Brevets

50

Aux termes du 1° de l’article L. 611-2 du CPI, un brevet est un titre de propriété industrielle protégeant une invention pour une durée de vingt ans à compter du jour du dépôt de la demande. Délivré par décision du directeur de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI), il confère, en application de l’article L. 611-1 du CPI, un droit exclusif d’exploitation à son titulaire ou à ses ayants cause.

La décision de délivrance d’un brevet, publiée au bulletin officiel de la propriété industrielle et notifiée au demandeur, intervient au terme de la procédure prévue à l’article L. 612-14 du CPI, laquelle donne lieu à l’établissement d’un rapport de recherche sur les éléments de l’état de la technique pouvant être pris en considération pour apprécier la brevetabilité de l’invention.

60

Les brevets délivrés dans le cadre de la procédure relative au « brevet européen », prévue par la convention sur la délivrance de brevets européens du 5 octobre 1973, sont assimilés aux brevets français dès lors qu’ils répondent aux mêmes critères de brevetabilité et sont délivrés au terme d’une procédure d’examen de ces critères. Cette procédure unique conduite par l’Office européen des brevets donne lieu à la délivrance de titres qui confèrent les mêmes droits que des brevets nationaux délivrés dans chacun des États contractants désignés lors du dépôt de la demande.

Remarque : La procédure dite de « brevet européen » est à distinguer de celle prévue par l’ordonnance n° 2018-341 du 9 mai 2018 relative au brevet européen à effet unitaire et à la juridiction unifiée du brevet, dont les dispositions entreront en vigueur à la même date que l’accord relatif à une juridiction unifiée du brevet signé à Bruxelles le 19 février 2013, non ratifié à ce jour.

2. Certificats d’utilité

70

Le certificat d’utilité est un titre de propriété industrielle délivré par l’INPI qui, comme le brevet, confère à son titulaire ou à ses ayants cause un monopole d’exploitation sur une invention répondant aux exigences de brevetabilité.

Il se distingue toutefois du brevet :

  • par sa procédure de délivrance, laquelle ne donne pas lieu à l’établissement d’un rapport de recherche sur les éléments de l’état de la technique ;
  • par sa durée de validité, qui est de dix ans à compter du jour du dépôt de la demande (CPI, art. L. 611-2, 2°).

3. Certificats complémentaires de protection rattachés à un brevet

80

Le certificat complémentaire de protection est un titre de propriété industrielle qui proroge la durée de validité d’un brevet protégeant un médicament, un procédé d’obtention d’un médicament, un produit nécessaire à l’obtention de ce médicament ou un procédé de fabrication d’un tel produit lorsque ceux-ci sont utilisés pour la réalisation d’une spécialité pharmaceutique faisant l’objet d’une autorisation de mise sur le marché en cours de validité.

Il prend effet au terme légal du brevet auquel il se rattache pour une durée ne pouvant excéder sept ans à compter de ce terme et dix-sept ans à compter de la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché (CPI, art. L. 611-2, 3° et CPI, art. L. 611-3).

B. Certificats d’obtention végétale

90

Le régime prévu à l’article 238 du CGI s’applique aux certificats d’obtention végétale délivrés en France par l’Instance nationale des obtentions végétales ainsi qu’aux titres étrangers équivalents délivrés par un office étranger de protection des obtentions végétales.

Il en est ainsi par exemple d’un certificat d’obtention végétale délivré par le bureau de la protection des obtentions végétales du Canada ou par l’Office fédéral de l’agriculture de la Suisse.

Il en est de même des certificats d’obtention végétale délivrés par l’Office communautaire des variétés végétales dans le cadre de la procédure prévue par le règlement (CE) n° 2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales.

Un certificat d’obtention végétale est un titre de propriété industrielle protégeant toute variété nouvelle, créée ou découverte, d’un genre ou d’une espèce de plante, délivré pour une durée de vingt-cinq ans, ou de trente ans pour certaines espèces, à compter de la date de la demande.

Il confère à son titulaire un droit exclusif de produire, reproduire, conditionner aux fins de la reproduction ou de la multiplication, offrir à la vente, vendre ou commercialiser sous toute autre forme, exporter, importer ou détenir à l’une de ces fins du matériel de reproduction ou de multiplication de la variété protégée (CPI, art. L. 623-1 à CPI, art. L. 623-16).

100

Seuls les titres mentionnés au II-B § 90 en cours de validité, à l’exclusion donc des certificats en cours de délivrance, sont susceptibles d’entrer dans le champ d’application de l’article 238 du CGI.

Cette condition implique que les certificats d’obtention végétale doivent :

  • ne pas avoir été déclarés nuls en application de l’article L. 623-23-1 du CPI. Dans le cas contraire, l’application du régime prévu à l’article 238 du CGI aux cessions, aux concessions et aux sous-concessions serait remise en cause, sous réserve des règles de prescription ;
  • ne pas avoir été atteints de déchéance pour non-respect de l’une des obligations énumérées à l’article L. 623-23 du CPI ;
  • ne pas être tombés dans le domaine public.

Le régime cesse ainsi de s’appliquer à la date à laquelle l’un de ces événements est intervenu, pour le ou les certificats concernés.

C. Logiciels protégés par le droit d’auteur

110

Le régime prévu à l’article 238 du CGI s’applique aux logiciels protégés par le droit d’auteur au sens du 13° de l’article L. 112-2 du CPI, y compris à leurs versions successives, simultanées ou non. Dès lors, les logiciels en cause doivent présenter un caractère original.

Un logiciel s’entend de l’ensemble des instructions, programmes, procédés et règles, ainsi que de la documentation et du matériel de conception préparatoire qui leur sont éventuellement associés, relatifs au fonctionnement d’un outil de traitement de l’information. Il est caractérisé par des éléments incorporels incluant les programmes nécessaires au traitement de l’information et leurs évolutions ainsi que d’éventuels éléments corporels servant de supports aux éléments incorporels.

D. Procédés de fabrication industriels étant l’accessoire indispensable de l’exploitation d’un brevet ou d’un certificat d’utilité

120

Les contrats portant sur l’exploitation d’un brevet ou d’un certificat d’utilité prévoient fréquemment le transfert simultané d’un procédé accessoire qui est lié à cet élément.

Pour tenir compte de cette situation, le 4° du I de l’article 238 du CGI fait entrer dans le champ d’application du régime prévu à ce même article les procédés de fabrication industriels non brevetables à la condition qu’ils constituent le résultat d’opérations de recherche et soient l’accessoire indispensable de l’exploitation d’un brevet ou d’un certificat d’utilité avec lequel ils font l’objet d’une même cession, concession ou sous-concession.

130

Un procédé de fabrication industriel correspond à un moyen technique qui est mis en œuvre directement dans le processus de fabrication d’un produit industriel.

Il se différencie d’une invention brevetable en ce qu’il constitue un niveau de connaissances propre à l’entreprise et en ce qu’il est dépendant d’un brevet ou d’un certificat d’utilité sur le plan technique.

Une formule de fabrication, si elle constitue effectivement un procédé de fabrication industriel, ce qui se distingue d’un simple dosage ou mélange de produits, est susceptible d’être retenue à ce titre si elle remplit les conditions requises exposées au II-D § 140 et suivants.

1. Première condition : le procédé doit résulter d’opérations de recherche

140

Les opérations de recherche dont résulte directement le procédé peuvent avoir été réalisées dans le prolongement de celles qui ont permis de mettre au point le brevet ou le certificat d’utilité dont il est l’accessoire, ou constituer un développement autonome de celles-ci.

Remarque : Les opérations de recherche sont celles définies au BOI-BIC-RICI-10-10-10-20.

2. Deuxième condition : le procédé doit être l’accessoire indispensable de l’exploitation d’un brevet ou d’un certificat d’utilité

150

Le procédé en cause n’étant pas lui-même brevetable, son éligibilité au régime prévu à l’article 238 du CGI trouve sa source dans son caractère accessoire et indispensable à l’exploitation industrielle d’un brevet ou d’un certificat d’utilité en cours de validité. Transféré de manière isolée, il ne bénéficie donc pas de ce dispositif.

160

Son caractère indispensable résulte du fait que, sans le procédé en cause, l’invention dont il est l’accessoire :

  • serait techniquement difficile à mettre en œuvre, ou ne permettrait pas d’atteindre un résultat technique ou qualitatif identique ;
  • ou ne serait pas viable sur le plan économique.

3. Troisième condition : le procédé doit être cédé, concédé ou sous-concédé aux termes du même contrat que le brevet ou le certificat d’utilité dont il est l’accessoire

170

La cession, concession ou sous-concession du procédé et du brevet ou du certificat d’utilité dont il est l’accessoire implique également que ce brevet ou ce certificat d’utilité soit en cours de validité.

180

Il en résulte que les procédés de fabrication industriels cédés, concédés ou sous-concédés de manière autonome, ou se rattachant à un brevet ou à un certificat d’utilité tombé dans le domaine public ou annulé (pour plus de précisions, il convient de se reporter au II-A § 30) sont exclus du champ d’application du régime.

190

Par ailleurs, le transfert d’un procédé de fabrication industriel et du droit en principal dont il est l’accessoire doit résulter d’un même contrat.

200

S’agissant des concessions de licences, il est admis que la condition relative à l’unicité de contrat soit considérée comme satisfaite à compter de la date à laquelle les transferts d’un procédé donné et du droit en principal auquel il se rattache sont réunis dans un même contrat, lors de leur prorogation ou lors de la conclusion d’avenants, si, dès l’origine, les deux éléments ont été transférés par des contrats séparés.

(210-260)

A. Opérations concernées

270

Le régime prévu à l’article 238 du CGI s’applique aux opérations de cession, de concession ou de sous-concession.

280

La cession s’entend de toute opération entraînant la sortie de l’actif de l’entreprise des éléments en cause (pour plus de précisions sur cette notion, il convient de se reporter au II § 90 et suivants du BOI-BIC-PVMV-10-10-20).

290

La concession d’une licence d’exploitation est le contrat par lequel le titulaire d’un actif incorporel éligible au régime prévu à l’article 238 du CGI (II § 10 à 200) concède à une personne dénommée concessionnaire, en tout ou partie, la jouissance de son droit d’exploitation moyennant la perception d’une redevance.

La concession peut :

  • être exclusive ou non ;
  • être conclue pour l’ensemble du ou des territoires pour lesquels l’invention bénéficie d’une protection juridique, ou pour une partie de ceux-ci seulement ;
  • porter sur la totalité des droits ou certains éléments seulement (par exemple, la concession pourrait ne concerner que certaines applications d’un brevet).

La notion de licence d’exploitation s’entend au sens large de tout contrat conférant au licencié le droit d’utiliser l’invention tant à des fins internes, pour ses besoins propres, que dans la perspective de produire et commercialiser des biens et services.

Lorsqu’une invention est protégée en France, dans un État membre de l’Union européenne ou dans autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen par un titre mentionné au 1° du I de l’article 238 du CGI, il est admis que les redevances perçues au titre de la concession de licences d’exploitation de cette invention dans des territoires où elle n’est pas protégée soient également comprises dans le résultat net de concession. 

300

La sous-concession d’une licence d’exploitation est le contrat par lequel le concessionnaire d’un actif incorporel éligible au régime prévu à l’article 238 du CGI (II § 10 à 200) concède à son tour à une personne dénommée sous-concessionnaire, en tout ou partie, la jouissance du droit qui lui a été concédé moyennant la perception d’une redevance.

310

Les modalités d’accès aux actifs concédés ou sous-concédés sont indifférentes dès lors que le contrat répond aux conditions mentionnées au III-A § 290 et 300. Ainsi, concernant les logiciels par exemple, l’accès peut notamment s’effectuer à distance à partir d’une plateforme d’hébergement ou par installation sur un équipement propre à l’entreprise.

B. Portée des contrats

320

Les contrats de transferts d’éléments de la propriété industrielle peuvent avoir un contenu très divers. Il y a donc lieu de distinguer les situations suivantes.

1. Le contrat porte exclusivement sur des actifs incorporels éligibles au régime prévu à l’article 238 du CGI

330

Dès lors que ces éléments satisfont aux conditions exposées au BOI-BIC-BASE-110-20, les dispositions de l’article 238 du CGI sont susceptibles de s’appliquer pour l’ensemble du contrat.

2. Le contrat porte sur des actifs incorporels éligibles au régime prévu à l’article 238 du CGI ainsi que sur des droits de la propriété industrielle non éligibles (notamment des marques, dessins et modèles) et/ou des prestations de services telles que l’assistance technique

a. Le contrat distingue ou permet de distinguer le prix facturé pour chaque élément ou prestation

340

Dans ce cas, les dispositions de l’article 238 du CGI ne concernent que les actifs incorporels éligibles qui satisfont aux conditions exposées au BOI-BIC-BASE-110-20, compte tenu de la répartition du prix faite par le contrat lui-même et sous réserve du droit de contrôle de l’administration.

b. Le contrat fixe un prix global pour l’ensemble

350

Dès lors que les dispositions de l’article 238 du CGI ne s’appliquent que pour les actifs incorporels éligibles qui satisfont aux conditions exposées au BOI-BIC-BASE-110-20, il appartient à l’entreprise de déterminer la partie du prix correspondant à la rémunération de ces actifs selon la méthode la plus adaptée et d’être en mesure de retracer cette méthode dans la documentation mise à la disposition de l’administration en cas de contrôle.

À cet égard, la ventilation du prix de vente global doit résulter d’éléments objectifs. Elle se fonde soit sur des comparaisons reposant sur des transactions réalisées à des dates proches et relatives à des éléments éligibles dont les caractéristiques sont similaires à celles sur lesquelles porte le contrat, soit sur une ou plusieurs clefs de répartition reposant sur des données comptables telles que :

  • la valeur intrinsèque des droits transférés ;
  • la valeur retenue pour l’acquisition des droits ;
  • le coût de revient des différents éléments et prestations couverts par le contrat.

Dans ce cas, les critères de valorisation retenus pour chacun des éléments du contrat doivent être homogènes.

Cet article provient du site Impôts.gouv.fr